Témoignage de Didier LABAEYE ("Morbecque")

2 décembre 2020

En ce jour important pour nous, je vois qu’on n’a pas oublié Stan. Je ne le connaissais pas plus que cela et il est possible que sans le rugby, j’aurais pu passer à côté de lui. Quand j’ai appris la nouvelle de son décès, j’ai hésité à raconter une petite histoire qui pourrait s’intituler l’essai de Stan mais comme l’occasion se présente à nouveau, je ne recule plus.

L’action se passe en demi-finale du TGE contre Polytechnique. On vient de se mettre tout seul en difficulté en vendangeant l’immanquable (il n’y aura pas de nom à la radio !). On se retrouve de nouveau dans les 22 mètres adverses mais les transmissions se font mal et l’action cafouille au point d’être au point d’arrêt. En face, ils ont déjà mis les barbelés. À ce moment, c’est Stan qui a le ballon. Pour ne pas le gâcher, il prend l’option de revenir sur ses gros et me fait la passe. Mais je ne suis pas lancé et je sens que je ne vais pas faire grand mal. Je percute le premier X qui se présente et je me retourne. À partir de là, tout s’enchaîne comme les exercices du Roi-Sergent sur le champ de Mars. Dans la formation du maul, le soutien est immédiat. Grunal qui va s’emparer de la gonfle est sur ce coup le demi de mêlée le plus heureux du monde. Pas seulement parce que le ballon est propre. Derrière toute la ligne d’attaque est déployée comme à la parade. De fait, quand le ballon gicle il est touché par toutes les mains. C’est Stan qui aplatit en bout d’alignement pour un essai d’école qui aura traversé toute la largeur du terrain. On ne le sait pas encore mais Stan _ à l’origine et à la conclusion _ vient de nous propulser en finale. Sur cet essai c’est tout lui mais c’est aussi nous tous.

Le lendemain en finale, c’est encore tous ensemble qu’il faudra mettre les barbelés pour préserver notre avantage. Le général ZELLER a eu un mot gentil pour Stan. Il était présent à cette rencontre car il avait fait le déplacement de Coët à Palaiseau pour voir ses boys dans les différentes disciplines du TGE. Au coup d’envoi, on était remontés comme des coucous mais de voir notre commandant de bataillon nous a donné un coup de vis supplémentaire. S’il n’était pas question de se défiler dans le combat au départ, c’était encore plus vrai après. Et s’il fallait des preuves, j’avancerais la bonne tenue de notre mêlée. Pour ma part, je me suis efforcé de lui offrir un spectacle moins affligeant que ma traversée de la piscine en matelas pneumatique lors du dernier challenge natation. Je raconte tout cela pas seulement pour faire le fayot : il y avait notre joie commune au coup de sifflet final comme il y avait notre peine commune à la nouvelle du décès de Stan. Un peu Stan, un peu nous tous.